Les couloirs et les portes sans fin. Les salutations du personnel de chambre. Les lits trop grands. Les baignoires insubmersibles. Les rideaux insensés. Les lampes et leurs interrupteurs. Les gros boutons blancs dans l’ascenseur. Les atours apportés prêts à être portés. Le feulement des chaussures sur ces tapis bordeaux. Le sentiment d’inconnu de ne pas savoir dans quelle direction, sur ce trottoir, se tourner. Se trouver sur ces avenues bondées. Rire de tout cela. S’entendre dire que l’on sait où l’on va. Lever les yeux au ciel, avoir du nez. Un compas. Choisir une table et s’attabler. Trinquer plusieurs fois à la nuit qui s’avance. Rire encore. Retrouver l’équilibre. Régler l’addition. Revenir sur ses pas, ne pas savoir pourquoi.
Si. Oh, si.
Car lorsqu’il fera jour, tout sera terminé.
Aviser valets, concierges, réceptionnistes et réceptionnés. Leur dire bonsoir, leur dire à demain, s’incliner sans se plier. Appeler l’ascenseur. Pousser du doigt le 7ème bouton blanc. Sortir sur la terrasse. Inspirer. Expirer. S’y reprendre à deux fois. S’adosser à la rambarde, fumer, respirer l’air du fleuve. Contempler les lumières de la ville. Compter les fenêtres éclairées. Se tromper, recommencer. Se laisser distraire. Suivre du regard les phares du trafic. Dodeliner. Réprimer un bâillement. Vouloir savoir l’heure. Se raviser. Ne pas vouloir savoir l’heure. Se demander quel est le numéro de sa chambre. Vérifier le médaillon attaché à la clef. Profiter encore de la vue sur la ville nocturne. Reprendre l’ascenseur. Se perdre dans les couloirs sans fin. Parvenir enfin à la porte marquée 319. Se glisser dans la chambre. Chercher l’interrupteur. Faire chou blanc. Se résoudre à tâtonner vers le lit. S’allonger. Laisser le plafond tourner. Garder les yeux ouverts. Soupirer. Tendre l’oreille aux bruits de l’hôtel. S’assoupir par intermittence.
Voir poindre derrière ces rideaux insensés les premiers feux du jour.
Finir par se lever. Remplir cette baignoire. S’y couler.
Tout sera terminé.