jeudi 11 août 2022

À l'école des buildings

La ville possédait en son centre un crayon tout pointu, à propos duquel on recouvrit, lors de son édification, de belles pages de critiques acerbes et de louanges bétonnées. Toujours bien taillé, ce totem vit apparaître à sa gauche une gomme toute lisse et toute propre, qui vint fort opportunément effacer trois décennies de domination graphique, au tournant des années deux-mille. Las ! Voilà qu’un troisième immeuble grappe-ciel, blotti tout contre la gare, veut à son tour faire état de son auguste silhouette, à coup de poutrelles d’acier.

Qu’allons-nous donc voir se dessiner à la droite de notre trousse d’écolier ? Un double-décimètre ? Un Stabylo ? Ou bien alors, pour faire bonne mesure, un jeu d’équerre, un rapporteur ?

Une chose est sure : en-deçà, les toits hérissés de cheminées de brique n’en font pas grand cas. Ils ont pour eux la multitude, et l’embarras du choix.  

lundi 8 août 2022

À tous les bouts de champs

Striées en quatre,
Sillons d’albâtre,
Simulacre.

jeudi 4 août 2022

Pas de deux à quatre pattes

De ces allées plantées de mûriers et de platanes on a déjà tant dit qu’il serait vain de ressasser ces vieilles lunes. Pour autant, puisqu’elles sont toujours là, toujours échevelées sous mistrals et tramontanes, un peu ravinées par les grosses pluies et les incessantes allées et venues des tracteurs, des remorques et des voitures ; puisqu’elles raccordent le mas et la ferme aux portes du domaine, empruntées tous les jours par des grappes d’enfants, des promeneurs solitaires, des visiteurs du matin et du soir ; puisqu’elles sont les artères campagnardes par lesquelles s’égrènent les récoltes ; pour tout cela il faut encore évoquer le sentiment de plénitude qui saisit celui qui revient après une longue absence, qui emprunte ces routes de terre rousse et de caillasses pour retrouver un parent, un cousin, un frère ; et, le pas tranquille, il lui arrive parfois de s’arrêter un instant, pour goûter la lumière et la caresse du vent, scruter la ligne d’un horizon victorieux, humer les parfums de garrigue et de pins ; il finit toutefois par reprendre sa marche, car on l’attend quelque part, là où la table est mise, le vin déjà versé, le pain déjà rompu.