samedi 30 juillet 2005

Pan-ô-rama

Vue d'un toit, toit de jour,
jour bien clair, clair-obscur,

bien sûr...

Vue, donc, de Xi'an,
par une journée claire :
Côté clair, côté mur.
L'autre, l'obscur,
c'est l'Ouest où la soie
s'est perdue.


Photo,
montage,
trucs, clichés, à montrer
là-bas.

C'est si loin.

black, white and quiet Posted by Picasa

Pagodes





C
à et là, au sommet d'un pic karstique, en bord de mer, d'un promontoire, au beau milieu d'une place, d'un désert ardent ou d'une plaine fertile, on trouve une pagode. C'est souvent un petit monument, se rapprochant davantage du cairn, contre lequel le pèlerin se repose, avant de psalmodier quelques phrases, dont on ne saurait dire si elles concernent une grande piété ou le repas du soir.








La pagode est monument pieux ; c'est aussi une balise dont on pouvait se servir pour admirer le ciel. Là où l'on érigeait - en Amérique latine et centrale, en Afrique septentrionale, dans la péninsule indochinoise - de formidables pyramides à degrés, la Chine préférait ces constructions crénelées, érectiles, et tout aussi évocatrices d'une cosmologie de niveaux successifs, corniche après corniche, vers un au-delà partagé.

C'est en lisant l'ouvrage de Paul Théroux, La Chine à petite vapeur, que j'en ai su davantage sur ce mot étrange. Paul Théroux voyage. En train. En Chine. En 1986. Il fait de nombreuses rencontres durant ses nombreux trajets qui le mènent d'un bout à l'autre de l'Empire. Il témoigne de tout cela, train après train, rencontre après rencontre. Là, c'est Manuel, un Portugais de Macao qui se rend a Canton pour le plaisir de s'y rendre. On aperçoit, au crépuscule, une pagode se détacher sur un fond de montagnes. Manuel :
"Pagode est un mot portugais [...]. Nous disons pagode en portugais - ça signifie bruit. Je suppose qu'ils associaient le bruit à ces édifices. Mandarin est aussi un mot portugais, de mandar, être en charge ; et le mot japonais arrigato (merci) vient de obrigado."

Ce n'est point la pagode vietnamienne, toute en toits de tuiles et en salles obscures, où de mystérieux moines bouddhistes vivent de prières et d'aumônes.
...

Mais à quel bruit le mot peut-il faire allusion ?

Au souffle, bien sûr, celui qui du chuchotement, du murmure, du sussurement, du sifflement, évoque cet air, si connu, du vent qui entre et qui sort, et qui sourd, long soupir qui fait battre le coeur...




Et qu'ainsi souffle le vent contre la pagode.



samedi 23 juillet 2005

Façades de Xi'an

Le dragon peut s'introduire partout, de même que tous les cambrioleurs malavisés (sont-ils, parfois, bien avisés ?).


Le dragon n'est pas toujours le bienvenu dans le logis familial. Pour le dissuader (et, accessoirement, les cambrioleurs éventuels), on peut clore toutes les issues par de formidables grilles - portes et fenêtres bardées d'innombrables barreaux : si cela évoque un esprit carcéral, c'est probablement autant pour séparer l'intér- de l'extérieur ; qui, des deux espaces, est celui de l'emprisonnement ?
Je ne saurai dire, ici, à l'expression de ces appartements cloîtrés...

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vendredi 22 juillet 2005

Xiu xi xiu xi






Journée réparatrice, peut être, passée sans trop de marches. Point de remparts franchis, d'omnibus pris ; avachi plutôt, à ruminer de futurs projets. Et quelques clichés sur lesquels je me suis penché pour en tirer un cadrage : de quoi illustrer l'écrit, le mangé, le regard à travers une fenêtre grillagée.





Demain ? Mais demain, de sortie !








Bonne nuit !





Extension du domaine de la Ville

Xi'an a une double représentation. Il y a le Xi'an "dans les murs" et le Xi'an "hors les murs". De la première on peut s'étendre sur son organisation très géométrique. Sur la seconde les mots manquent pour distinguer l'envers de l'endroit. On a peine à croire que tout cela était contenu il y a quelques dizaines d'années encore. C'est maintenant une agglomération débordante, aux tours et détours infinis, aux quatre point cardinaux.
L'appartement de mon amie Nathalie est sis porte Ouest, "hors les murs". Quelques pas et l'on peut voir cette porte de l'Ouest, où par de grandes galeries on peut pénétrer dans la ville. Je m'y faufile jour après jour, prétextant un futile projet : puisque de quadrilatères il s'agit, autant les parcourir les uns après les autres, carte en main, pour méthodiquement explorer la cité bout à bout. D'autant que la toponymie n'est pas en reste : ce ne sont qu'avenues aux doux noms de "Grande rue de l'Ouest", " Deuxieme rue Ouest-Sud", "Troisième rue Sud-Ouest", "Grande rue du Sud", "Cinquième rue Sud-Est", bref, un Manhattan ceint de murailles. Hors les murs est une autre histoire, où les artères ont le désagréable privilège de tourner d'une direction à une autre. Là, on se perd au fil de la marche. Mais on finit toujours par se retrouver devant de hauts murs, et, si la vigie n'est plus là, la boussole mentale reprend le dessus.
Ce soir nous nous sommes arrêtés à l'auberge de jeunesse "dans les murs". Cosmopolite à souhait, voilà de nombreuses conversations qui se nouent en d'autant de dialectes : c'est du chinois ou pas, peu importe. Bières aidant, on se fait coulant : l'heure tardive nous rappelle au retour.




Taxi aux couleurs verte et blanche, au chauffeur obtu : c'est que pour lui aussi, c'est du chinois, mais on finit toujours par retourner à bon port. D'où j'écris ces lignes tardives avant de prendre un peu de repos. Il me reste bien des pâtés de maisons à explorer ces jours suivants ! Avant, bien sûr, de m'aventurer dans cet "hors les murs" aux montagnes si proches...

mardi 19 juillet 2005

Droit de cité

Xi'an est, littéralement, surchargée d'histoire. Pas une rue, pas un carrefour, pas un bâtiment qui ne soit l'émanation d'événements d'importance pour l'Empire, tout centralisé qu'il était en ces temps reculés. Et, vu de très haut, et de très loin dans le temps, on peut distinguer ce qui faisait l'orgueil, la puissance et la gloire de cette cité millénaire. C'est que, à l'image de ce que la culture gréco-latine a nommé cité, nous voilà bien en face du même phénomène d'organisation urbain : muraille périphérique, cardo et decumanus découpant la ville en autant de quartiers parallélépipédiques, angles droits et gestion sociale de l'espace. On retrouve ce souci de la forme urbaine d'Herculanum à Kyoto, chaque fois que la cité avait un pouvoir politique à défendre et à faire prospérer. C'est que, sans trop d'amalgame, on associe l'espace physique, sa droiture et sa rigueur à la géométrie morale du pouvoir en place : solide et d'une grande rectitude. Impérial.

lundi 18 juillet 2005

Périple au milieu de l'Empire

Le 14 juillet les ressortissants de nationalité française - où qu'ils soient - s'agglomèrent en parties fines où l'on serait bien en peine de ne pas trouver, parmi les convives rassemblés pour l'occasion, de ces mages droit sortis de l'imaginaire collectif qui ont dans leur besace qui une bouteille de vin rouge, qui un fromage fait, qui une terrine de foie de volaille. Et l'on célèbre ces agapes à coup de santé crié vers le ciel, lorsque l'ivresse n'en est qu'à ses débuts.
C'était un soir comme celui-là qu'il me fallait dire au-revoir à cette ville de Dalian, toute embrumée encore - je commence à la soupçonner d'une trop grande timidité à force de se farder de ce brouillard quotidien - et n'offrant plus alors que ses quais pour un embarquement prochain. J'avais encore fait mes bagages à la va-comme-je-te-pousse, entre l'aurore et l'aube, et j'attendais l'oeil presque clos, de pouvoir trouver un siège dans ce drôle de bateau qui allait m'amener de l'autre côté du détroit, dans un autre port du nom de Yen tai. Drôle de bateau parce que je ne sais plus comment nommer ces machines dont la coque ne touche presque plus l'eau à force de propulsion digne d'un aéronef. Et c'est bien d'un vrombissement de boeing qu'il s'agit lorsque l'engin file à toute allure, plus vite qu'un Jésus parcourant le cent mètre.
De Yen tai point de souvenirs, sinon celui d'un tricycle à moteur pris dés l'accostage pour se rendre à la gare routière où un bus pourrait me prendre jusqu'à Qing dao, - Ah, Tsing tao - but du voyage de ce jour.
Quelques trois heures de mauvais sommeil plus tard, premiers pas dans cette ville au nom si célèbre en Asie, et jusque sur les tables de tous les restaurants asiatiques de par le monde, de par sa bière brassée il y a bien longtemps par les colons germaniques, venus jusqu'ici pour ne pas laisser les Hollandais faire tout le traffic sous leur barbe. Qing dao parcouru en une seule et heureuse après midi d'une course éperdue, avec l'aide d'un guide tout attentionné pour me faire faire le tour le plus stakhanoviste de ce que la ville avait à offrir : places de la Chine moderne, de béton, de verre et d'acier, déjà vue maintes fois sous d'autres cieux chinois ; plages de sables où s'égaient la populace ; monuments cossus bâtis par les Teutons, à l'apogée de leur présence là voilà plus d'un siècle : palais de gouverneur mégalomane, caserne d'une soldatesque à la pierre martiale, demeures vastes et froides aux nombreux pignons chers aux riches coloniaux, église roide d'un protestantisme si éloigné de ses racines...
Crépuscule aidant, nous voici mon guide-ami et moi-même au restaurant avec quelques-uns de ses amis, et de son grand frère : repas de bière et de poissons - comme de bien entendu - où l'on convient à coup de verres cul-secs qu'on est les meilleurs camarades du monde. Et d'aller s'en jeter une autre encore, dans l'une de ces innombrables usines qui parsèment la ville, où le frère à de quoi faire encore aux heures tardives. Visite d'un atelier de confection, où des centaines de petites mains s'activent sous la lueur blafarde de néons qui ne s'éteignent peut-être jamais. Je pouvais à ce moment-là souhaiter prendre un peu de repos, car un train m'attendait en gare le lendemain à l'aube. Point trop n'en fallait, de ce repos-là, que je pouvais prendre en cours de route. Non, ce qu'il fallait pour clore les festivités du jour, c'était du chant et de la binouze. On s'en fut donc gaiement au karaoké pour brailler tous en coeur...


Je n'ai point manqué mon train du lendemain-à-l'aube, parce que j'avais à me rendre assez vite au centre du pays y voir une amie depuis longtemps perdue dans ces contrées-là. Le train s'ébranla à l'heure dite, bien tôt, et me laissa tout pantois à la fenêtre pour contempler l'oeil un peu vitreux Qing dao disparaître. Puis je m'en vins m'allonger sur ces couchettes dures qui sont le bonheur d'un voyage ferroviaire dans le pays chinois, parce qu'on peut s'y vautrer pour s'assoupir sans peine, sous la brise vrombissante d'un ventilateur anté-diluvien. Ce que je ne manquai pas de faire tout au long du trajet, une journée complète au rythme lancinant du tac-tac des trains de mon enfance.

Xi'an au petit matin, c'est encore une cohue bon-enfant. Je me faufile à travers les taxis en maraude, pour récupérer un bus plein comme un oeuf. Ce sera la dernière étape. Après cela, je serai arrivé, assez fourbu, pour poser mon barda.

Dalian 15 juillet - Xi'an 17 juillet

lundi 11 juillet 2005

Navigation

Aujourd'hui encore me voila evoquant l'anniversaire d'un evenement historique. Ou plutot, l'un des premiers de toute une serie qui marqua a jamais le commerce international.
C'est un 11 juillet, donc, mais il y a tout de meme 600 ans. Fichtre. Une lointaine date ou, de Liujiagang, un port de l'embouchure du Changjiang à Taicang, Zheng He larga les amarres nombreuses de ses nombreux vaisseaux. Il entama alors le premier de ses voyages qui le menerent dans l'archipel indonesien, en Afrique orientale, et meme en Amerique alors qu'Amerigo Vespucci n'etait peut etre pas encore ne. Decouvertes, donc, de nombreuses routes qui allaient etre empruntees jusqu'a maintenant, entre plusieurs continents.
On chuchote meme que les cartes du celebre navigateur arriverent jusqu'en europe ou de fougueux et ambitieux Columbus projeterent de s'y frotter.
L'honneur est peut etre sauf et notre ami Colomb peut reposer en paix.
Mais voila tout de meme encore un mythe brise sous les coups de butoir d'une histoire bien lointaine... Ah ces Chinois !

vendredi 8 juillet 2005

Le pont de Marco Polo

Le 7 juillet est une date de triste memoire. Elle va commemorer, une fois de plus, le debut d'une periode de crainte.
Le 7 juillet 1937 commencait, pas tres loin d'ici, l'invasion japonaise en Chine.
Les troupes nippones traverserent le pont de Marco Polo (Lugouqiao), proche de Pekin, et ce fut l'etincelle. La poudriere sauta d'un bout a l'autre de l'Asie pendant les huit annees suivantes, jusqu'a la defaite de l'armee imperiale japonaise, sous les coups des Chinois, des Soviets et des Americains.
Beaucoup de bruit, ici, sur cette date historique : c'est que le voisin nippon n'a pas bonne presse ces derniers temps. Alors on galvanise le quidam a coup d'expositions-souvenir ou tout est bon pour stigmatiser la perfidie adverse.
Ce jeu-la me fait un peu peur ; je ne souhaite pas l'exarcerbation de sentiments patriotiques, tant ils sont sources d'actions regrettables.
Esperons une Asie tout aussi unie que l'Europe dont je reve... Et ce n'est pas d'une constitution qu'il s'agit !

mercredi 6 juillet 2005

Xing Hai : L'etoile de mer

On pourrait se sentir coupable de ne pas ecrire sur un tel monument. J'y suis retourne hier au crepuscule, et l'impression que j'en ai eue a oblitere la premiere - mauvaise - que j'avais ressentie lorsque nous nous y etions rendus, mes collegues et moi-meme, juste apres mon arrivee dans la ville.
On en parle comme d'une piece architecturale majeure dont tous les habitants de la province seraient fiers. C'est vrai qu'ils debarquent par cars entiers pour parcourir, en lente cadence, la travee centrale qui mene du Centre a la Peripherie et, juste en face, a la mer. Long parcours un peu repetitif, mais c'est justement cela qu'il faut venir chercher ici : le sentiment aigre-doux d'un ennui motive.
Xing Hai est le nom donne a cette place. Place n'est peut etre pas le bon mot, mais c'est celui que tout le monde utilise. Disons que la municipalite a voulu, dans sa grande modestie, niveler et creer ex nihilo, sur un coin de plaine en friche proche de la cote, une esplanade a la mesure de ses ambitions. C'est devenu, bon gre mal gre "la plus grande place d'Asie". Et je suis sur, pour l'avoir encore parcourue hier, que cela n'est pas usurpe.
Simplement, cela ne correspond pas a la representation mentale que je me fais d'une place : ce n'est pas un espace delimite par le bati. Ce n'est pas l'expression humaine de l'horizontalite par la pierre. C'est plutot une vaste plaine herbeuse, entrecoupee de voies a sens uniques ou s'embouteillent les cars de touristes. Tout autour, ce que les promoteurs immobiliers reussissent le mieux a faire : des tours d'une cinquantaine d'etages pour logements fonctionnels et couteux. Plus loin, un monumental Centre de Conference et d'Exposition. Et, derriere tout ce fatras, la ligne de crete des collines alentours.
L'effet est certes la, mais il me laisse un arriere-gout d'approximation. C'est une tres grande place. Si grande, peut etre, qu'elle en a perdu ses propres frontieres. C'est un grand champs bien ordonne, ou l'on marche en cadence.

vendredi 1 juillet 2005

Tele-Visuel

J'ai, dans ma chambre universitaire, un gros poste de television. Grand ecran, a un metre de mon lit, que j'allume de temps a autre pour tromper la solitude, pour ouvrir la "fenetre-sur-le-monde" chinois, pour me distraire et regarder ces films en DVD qu'on vend a la sauvette pour une bouchee de pain.
Il y a dans le panel des chaines - exclusivement chinoises - que je recois, une qui retient toute mon attention : chaine nationale diffusee partout, et qui l'incommensurable avantage d'etre en anglais, langue que je puis suivre plus aisement que le staccato mandarinal.

Quelques observations, donc, sur cet organe des medias au service de l'ideologie en vogue a Pekin : D'abord, et c'est ce qui frappe le plus, cette chaine oscille toujours entre reportages exotiques de bon aloi et emissions plus "serieuses" ou l'on parle porte-feuille. Mais, a y regarder de plus pres, on s'apercoit que c'est bien du porte-feuille dont il est pratiquement toujours question. Je n'ai jamais entendu le mot "investment" aussi souvent que lorsque j'allume cette boite a image. C'est qu'elle se donne les moyens de ses ambitions, cette Chine a plusieurs vitesses : et quoi de mieux que ces messages publicitaires annoncant en rafale la tenue d'une "Trade fair" dans telle ou telle province, montrant un jeune expatrie ravi s'installant dans un de ces "compounds" ou il pourra faire fructifier sa nouvelle vie d'entrepeneur audacieux, et ces bulletins d'informations illustrant a coup de phrases chocs les radieuses statistiques du ministere de l'economie.
Ah, La Chine-de-la-tele ! Miraculeuse, vous dis-je !

Ce matin, avant de me rendre a mon cours, j'allume. Je tombe sur un petit reportage sur les ressortissants etrangers qui ont eu la chance d'obtenir leur "green card" (calquee sur le modele americain de la carte de resident permanent). Interview de tres riches expatries, president ou vice-directeur de grosses entreprises de BTP ou du secteur bancaire, tres heureux de posseder un tel sesame. S'ensuit une discussion avec une charmante chinoise du bureau de l'immigration, qui precise les termes de la transaction. Ne peuvent postuler a l'obtention de cette carte que :
1. les etrangers travaillant dans une entreprise d'etat chinoise depuis plus de 5 ans
2. les etrangers travaillant dana une entreprise etrangere depuis plus de 7 ans
3. les etrangers qui ont investi plus de 5 millions de dollars en Chine
4. les etrangers qui ont rendu un service "special" a la nation chinoise (sic)

Bien. Je dois pour ma part m'occuper de proroger mon visa etudiant. Les demarches devraient etre plus informelles.