dimanche 25 février 2024

Pôle position

  

D’une métropole à l’autre, depuis l’observatoire le plus haut accessible au public.

  • Tōkyō, à gauche, vu depuis la Tembo Galleria de la Tōkyō Skytree, 450m au-dessus du sol.
  • Sài Gòn, à droite, vu depuis la terrasse du Blank Sky Lounge, au 76e étage de la tour Landmark81, située approximativement 380m au-dessus de la mêlée urbaine.

Contrastes et similitudes des cités asiatiques…

dimanche 18 février 2024

Inventerre

 

De nouveau suspendu entre ciel et l'eau, et la terre,

Pour faire collection de silhouettes.

Filiformes, longilignes,

Galbées, girondes, graciles, 

Audacieuses, communes, trapues, malignes,

Toutes dressées, toutes découpées sur la toile de la ville. 


jeudi 15 février 2024

II - Hôtel Belonzio

Agrippé sur un éperon de pierres rouillées, l’hôtel est un dédale de rampes d’escaliers, de paliers, de terrasses et de balcons. Briques rouges, tuiles rouges, pierres rouges, que viennent strier d’une blancheur crue des huisseries de bois peint, qu’il faut forcer un peu pour ouvrir les salons et les chambres. On se prend parfois à laisser les portes ouvertes, par habitude : le lieu est si propice aux allers et venues, aux montées, aux descentes, aux prises d’air, aux lectures interrompues, aux siestes impromptues.    


Il y a là parmi les hôtes de cet établissement un vieux militaire, grabataire, qui ne se déplace qu’avec escorte et litière. Il passe ses journées à demi-allongé, à scruter le paysage, inlassablement, silencieusement, immobile, toujours en uniforme, un uniforme vert-de-gris cousu de médailles et rehaussé d’épaulettes étoilées. Il regarde, du soir au matin, l’horizon vers le sud-ouest, sans que jamais il ne réagisse, ni aux formes des nuages, ni aux couleurs parfois sublimes que le ciel peut offrir, aux aurores surtout, aux crépuscules aussi. Non, il reste là, absorbé dans l’absence de changement, parce que jamais le paysage ne change. C’est une plaine immense, de rizières biscornues, estafilée de petits cours d’eau serpentins qui parfois se décident à filer droit. Il y a bien quelques oiseaux pour animer cet atone décor, mais cela ne suscite guère son intérêt. Ses factotums veillent sur lui, le sustentent à heures fixes – toasts, thé, potage ou gruau, un peu de jambon ou de fromage, un verre de vin, qu’il avale sans sourciller. Jamais un mot, jamais un son, juste quelques soupirs parfois, lorsque la nuit finit par tomber, et que la plaine s’estompe dans l’obscurité.


Bien des rumeurs courent, de degrés en degrés, d’alcôves en fumoirs, à propos de ce singulier pensionnaire. D’aucuns prétendent qu’il s’agit d’un dictateur d’opérette, échoué là pour finir ses jours en paix ; d’autres avancent l’idée qu’il fut grand héros d’une guerre lointaine dont ils ont eu vent, il y a longtemps. Quelques-uns le soupçonnent de mystification, ou de mythomanie. Pour connaître le fin mot de l’affaire, il faut glisser un petit billet au groom. Lui, il sait, il le tient d’ailleurs des soubrettes qui papotent aux petites heures avec le concierge et le voiturier. Cet hôte cacochyme emmuré dans son mutisme n’est autre que Zangra, oui, lui-même, vieux général en retraite qui a fui son Royaume pour s’établir ici, sur ce promontoire naturel, y retrouver la plénitude d’un horizon vide de toute signification. Il souhaite pousser son dernier souffle ici, entouré de pierres rouges, dominant l’immensité verte des campagnes orientales, sans ennemi aucun qui viendrait le surprendre dans son ultime désertion.

 

mercredi 14 février 2024

I - S'appelle-t-on Zangra ?

  
Depuis ce poste de vigie, la plaine est infinie, parcellée façon puzzle, sans plissement aucun. Courue de fils d’eaux, tissés au gré des érosions. L’étalement revêt mille nuances de verts, entrelacées de blanc, piquetée de poteaux tricotant la campagne. Pléthores d’échassiers picorent ce paysage autrement dénué de toute activité. On se demande alors, si hauts perchés, pourquoi le paysage est suspendu à notre attente. Ou peut-être est-ce l’opposé, et nous sommes seulement suspendus à l’attente elle-même, devant ce décor immuable et éternellement vacant.

lundi 12 février 2024

À celles qui servent le soleil

 

Jeu d’ombres et de lumières sur les Adityas qui gardent le Mont Meru, dans la pagode khmère de Phù Ly, à quelques encâblures de Cần Thơ. 

dimanche 11 février 2024

Cruise Control

« Pardieu, le Bassac ? Embarquer sur le Bassac ? Allons, mais ce vaisseau-là, je le croyais en cale sèche depuis longtemps ! Il vogue encore, dites-vous, du Tonlé Sap jusqu’aux cités lacustres du delta du Mékong ? Cornegidouille ! Et quand donc doit-il larguer les amarres ? Dans trois jours ? Le temps de préparer l’attelage qui nous conduira aux docks de Cái Bè… Bien, je vais faire le nécessaire pour que nos malles soient prêtes, pour… Pour une nuit à bord ? Sacrebleu, nous n’irons pas trop loin alors ! Dites m’en davantage, allons !... L’appareillage depuis Cái Bè, je vois, c’est praticable en cette saison. Puis nous descendrons le Cổ Chiên sur vingt mille nautiques, pour bifurquer sur la rivière Mang Thít où nous mouillerons pour la nuit. Sage décision, vu la faune qui y festoie aux heures sombres... Les tigres et autres léopards, je les préfère en trophée qu’enragés. À l’aube, si l’on n’est pas baisé comme un tacaud dans la vase, nous devrions remonter le fleuve Hậu pour rejoindre Cần Thơ et, de là, nous poursuivrons notre route par voie de terre vers le Nord. Fichtre, c’est une belle aventure, mes gaillards ! Allons donc faire provision de quelques spiritueux, pour trinquer à l’appontage prochain ! »