dimanche 31 juillet 2022

Portraitures

Qu’y puis-je, si le sujet est exactement à la portée du téléobjectif, et qu’il présente – par trois fois – son meilleur jour ? Eh bien, je le saisis au vol, en fait un triptyque, et c’est bien fait pour lui !

samedi 30 juillet 2022

Vers les cimes

C’est de l’arpitan. Du franco-provençal, si vous préférez, et cela signifie « pré, pacage, prairie ». On s’en serait douté, au vu de la topographie. Pour autant, cela fait bien longtemps que ces terres arables ne sont plus cultivées, et qu’elles ont été vendues au plus offrant, pour y bâtir de fastueux chalets, à quelques bornes de Chamonix. Les Praz, c’est aussi une petite église chapeautée comme une aiguille, au pied de laquelle on peut s’étendre sur l’herbe et goûter le soleil. Bien au-dessus, les parois grises du Dru s’élèvent vers le ciel pour se dissoudre dans les nuages. Cliché alpestre, sans filtre.   

vendredi 29 juillet 2022

Couchantes peintures

Une chose est sure. Les lumières au crépuscule sont magistrales.

lundi 25 juillet 2022

Et vice-versant

L’ubac dessine ces pentes superposées,
L’adret n’en a cure, tout à l’exposition de ses textures.

dimanche 24 juillet 2022

Se mettre en jambe


Une ascension douce vers le Prarion, pour contempler l’ensemble du massif. La litanie des sommets que l'on discerne au loin donne le tournis : Pointe de Platé, Tête du Colonney, Pointe d’Areu, Mont Charvey, Mont Fleuri, la Grande Balmaz, l’Aiguille des Glaciers, le Dôme de Miage, celui du Goûter et, derrière, toujours un peu timide de se savoir le plus élevé, le Mont Blanc. En enfilade, l’Aiguille du Midi, du Plan, du Grépon. La Verte et le Chardonnet, au loin, ferment le ban.


samedi 23 juillet 2022

Alps revamped

Ce point de vue-là est original. Jamais auparavant n’avions-nous élu domicile si bas dans la vallée, dans le village des Houches. Le profil de ces montagnes si familières est ainsi bien différent. De quoi s’amuser à reconnaître les sommets sous un jour tout nouveau…

mercredi 20 juillet 2022

Des aventures extraordinaires


Franchir les grilles du Jardin des Plantes, c’est marcher dans les empreintes d’Adèle. Oui, la Blanc-Sec, l’égérie du dessinateur et scénariste Jacques Tardi à ses heures les plus primesautières. On se doit aussi de visiter les bâtiments du Musée d’Histoire Naturelle, de lever la tête plus d’une fois à l’affût d’un ptérodactyle qui cercle encore et toujours au-dessus des toits de la Galerie de l’Evolution. 

Le Pithécanthrope, lui, est bel et bien au garde-à-vous et tout osseux, au deuxième étage de la Galerie de Paléontologie et d’Anatomie comparée. Une journée d’observation entre zoologie, minéralogie, botanique, avec tout de même quelques regards par-dessus l’épaule, pour être sûr que le professeur Espérandieu n’est pas dans les parages.

mardi 19 juillet 2022

Versailles Chantier - Non desservi

Il n’y a pas plus magistral cas d’école que celui de Versailles. Cas d’absolu, cas d’abstraction, cas d’abdication face aux contraintes du réel. Et surtout, illustration prodigieuse du second principe de la thermodynamique appliqué à un régime qui fut défini comme de droit divin, exonéré donc des sujétions matérielles de notre bas monde.   

Oui, posé là, comme ça, ça a l’air un peu abscons. Etayons donc le propos, et revenons en arrière.
C’est parce que le premier monarque à en faire usage était agoraphobe et pris de soudaines crises de mysticisme que ce petit pavillon de chasse, sis au sommet du plateau de Versailles devint un lieu prisé. Louis XIII participe d’ailleurs personnellement à l’édification de cette bicoque. Rien que de très banal : un plan rectangulaire entouré de fossés, un corps de logis en brique, une cour et une porte cochère du plus bel effet. C’est charmant. Les battues sont sublimes, le gibier abondant. L’esprit reste féodal, rustique, terre à terre et bon enfant. Mais le « chestif chasteau », des 1630, a les crocs. Il lui faut plus de domaines, plus de sentiers, plus de courre. Et plus de prestance. Alors on agrandit, on décore, on flamboie. Mais Louis XIII n’est pas éternel, et son jeune successeur est encore bien trop bleu. Sous régence de Mazarin, on laisse le lierre pousser. Rien ne sert de s’encombrer d’une dépendance bien trop forestière et trop loin des centres du pouvoir. Ce n’est qu’en 1660 que Louis XIV, alors à ses seize bougies, manifeste un intérêt certain à la rempoignade du domaine jusque-là en déshérence. Le gamin a d’abord la main verte : ce sont les vergers et les parterres qui l’occupe. Et puis forcément, parce qu’il fonde famille, il lui faut des pièces en plus. Alors, on élargit, on construit des appartements, on élague, on fait place nette. Ça fait de l’ombre au Louvre, jugé trop engoncé. S’ensuit ménagerie, orangerie, expansion du petit château doté dorénavant d’ailes enveloppées de belles pierres. De lieu de villégiature, la demeure palatiale se transforme en siège du pouvoir, au grand dam d’une courtisanerie peu au fait des us pastoraux de ces faubourgs sylvestres. Qu’importe, on emporte trousseaux, perruques, parfums, poudres et toutes les panoplies pour faire bonne figure sous ces dorures omnipotentes. Le Roi n’en reste pas là, il veut un ordonnancement qui sied à sa stature astrale : au-dehors, jardins, canaux, statues ; au-dedans, salons en enfilade, galerie de miroirs, chambres, antichambres, antichambres d’antichambres. Ce jeu d’expansion, les Louis consécutifs et légataires en sont également de fervents amateurs, bien que leurs contributions se montrent plus modestes.

Mais voilà, ce bel arrangement, ces allées arborées tirées au cordeau, ces corps de bâtiment étirés jusqu’au point d’horizon, ces pièces parquetées tendues de mille brocards, tout cela finit par chiffrer. En espèces, certes, mais aussi en propriétés physiques. Surtout – si nous poursuivons ce raisonnement passablement alambiqué – en entropie. C’est qu’à mesure que se concentre dans les appartements du Souverain un système drainant de si larges ressources à son seul privilège, se produit en retour une demande toujours plus grande d’énergie nécessaire à la perduration dudit système. Et toute cette énergie – ce travail des hommes, des bêtes et des choses – finit toujours par se dissiper, se déliter, se dilapider aux entournures. Ça frémit aux franges du pays. Ça n’obéit plus. Le détricotage se propage, s’encourage. Des collectes on ne retire plus rien. Des violences on se rebiffe. Bientôt on se révolte.  
Ainsi s’évanouit, s’évapore un Pouvoir, si vite remplacé par un autre qui élit domicile ailleurs.

Les pierres et les arbres de Versailles sont encore là. 


Ils conservent une majesté certaine, mais nous avons trouvé depuis d’autres sources d’énergie pour les neutraliser.

lundi 18 juillet 2022

Du parterre au partiel

On resitue. C’est donc du sable, de la marne, de la caillasse et du calcaire grossier sous les pieds. On en a fait des carrières, qui, sous Napoléon le troisième, sont devenues jardins. Mais, bien avant, le lieu faisait pente douce à côté d’un village, celui de Chaillot, défendu alors par un petit château qui dominait ce méandre de la rivière, dont les contours suivaient les murs du Couvent des Visitandines. On peut se figurer un verger, un maraîchage, sur ce versant argileux qui descend vers la Seine. Quand ? À la louche, vers 1760, mais on peut être large.

Par la suite, on ratiboise. Ça tombe bien, le couvent est détruit en 1794, rétrocédé à l’état, qui ne sait trop quoi faire de ces ruines fumantes. Ça tergiverse, ça laisse en pâture. On pense à édifier un palais, un ensemble de villas, mais rien de concret ne sort de terre. Pendant ce temps, on guerroie un peu partout, de l’Espagne à la Prusse pour faire provision d’une jolie réserve de victoires aux appellations exotiques qu’on accolera ici et là aux ouvrages d’architectures, fussent-ils monarchiques ou républicains. Tenez, cette grosse meringue qu’on finit par édifier en 1877 sur ce site en jachère ? Nommons-le en l’honneur de la forteresse de Cadix, tombée à l’issue d’une bataille épique. Trocadéro, ça sonne bien, ça fait un peu toréador, ombrageux et solaire en même temps. Et ce pont qui enjambe enfin la Seine, courant 1813 : Le Pont d’Iéna ! Ça évoque les plaines franconiennes, l’humus, la tourbe et les morts à foison ; et puis ça fait raccord avec ce Champs de Mars, cette esplanade morose où se succèdent les parades fanfaronnes devant la nouvelle Ecole Militaire.  

Et ce terrain tout plat, encadré pâté par pâté d’immeubles de rapports aux jolies proportions, témoin de toutes les fantaisies bellicistes durant deux empires finit par devenir, par un heureux concours de circonstances, l’épicentre du progressisme. On y expose tout l’univers – colonies comprises – à plusieurs reprises, quasiment à chaque décade de 1867 à 1900, et son agencement tout à l’horizontal change un brin lors de l’érection phénoménale de la Dame de Fer, début 1887.
En 1889 c’est la consécration. Jamais rivets et poutrelles d’acier ne sont allés titiller le ciel à cette altitude-là. On se presse, on conspue, on s’extasie, on en tombe des nues. À tel point d’ailleurs que cet enchevêtrement d’éléments métalliques, promis à un démantèlement dans les règles, obtiendra rémission. 

On le garde.
On en prend garde.

Et nous, en ce matin de juillet 2022, malgré le sable et la marne sous nos pieds, nous en mesurons, de loin, la haute stature, pour attaquer plus avant une ascension marche après marche du pilier Nord-Ouest, jusqu’au deuxième étage.     


Pause et gaz à tous les étages

Nous savons ce matin de quels escaliers nous allons nous chauffer.

dimanche 17 juillet 2022

Lignes de champs

Grands boulevards, places d’apparat,
Tailles de pierre, réverbères,
Toute la ville au cordeau,
Tirée à quatre épingles.

samedi 16 juillet 2022

Premiers pas sur la rive droite

Revenir à Paris, un matin de Juillet. Très tôt.
Au sortir de la bouche de métro Château d’Eau, reprendre ses marques, tourner à gauche, à droite, puis à gauche encore pour s’engager dans la Cour des Petites Écuries. Constater que rien n’a vraiment changé dans le quartier ; le bar tabac Reilhac au coin et son auvent de toile rouge, la brasserie Floderer et ses carreaux en culs de bouteille, les trottoirs pavés que picorent quelques pigeons goguenards.
On y côtoie les Sénégalaises venues là pour des coiffes tressées, les Kurdes de retour d’un thé mentholé, des Tamouls au sabir railleur. On veut poursuivre son chemin, se glisser, via la rue d’Enghien, dans le passage du Prado. On passe de devanture en devanture, épiceries, bazars, échoppes de gadgets électroniques, bijouteries, bureaux de change. Il fait frais encore, mais on soupçonne le soleil de ne pas en rester là.
On émerge au carrefour Strasbourg-Saint Denis et, sans embarras, on enjambe le Sébasto entre deux feux verts. Là, la cadence se fait alors plus chaloupée. C’est le faubourg Saint-Martin, plus cossu, plus alangui. Il faut se faufiler entre poussettes et gros scooters, jeter un coup d’œil rapide aux toitures effilées du Conservatoire des Arts et Métiers, filer droit le long des grilles de Saint-Martin des Champs, de Saint-Nicolas-Des-Champs, et, après quelques minutes de flânerie dans ces rues plus étroites, parvenir, enfin, sur l’esplanade Georges Pompidou.
Là, on marque un temps d’arrêt pour contempler le mécano, les lignes claires, les gerberettes, les escaliers roulants, les manches à air. Il y a foule déjà, qui fait grappe un peu plus bas, pour accéder aux portes tambour du musée d’Art Moderne, sous les acclamations d’autres quidams qui profitent des performances de concertistes inspirés par l’acoustique du lieu. Le soleil ne veut plus faire figurant. Il commence à taper sans vergogne.


Il faut contourner Beaubourg par la gauche, emprunter la rue du Renard pour la traverser au plus vite. Sitôt sur le trottoir, côté Est, descendre vers la Seine, et surtout, surtout, ne pas tourner à gauche vers le Marais. Cela signifierait se perdre dans les marigots de la vieille ville, aboutir sans trop savoir comment à la Bastille et vouloir tout de suite faire table rase. Ce n’est pas à l’ordre du jour, alors que le mercure continue à monter.
Non, garder le cap plein Sud, pour parvenir Place de Grève. Saluer l’Hôtel de Ville, deviner au loin les tours carrées de Notre-Dame, puis prendre par l’Avenue Victoria pour s’asseoir un instant à l’ombre des saules qui font cour auprès de la Tour Saint Jacques. Fermer les yeux, écouter un instant les stridulations du trafic sur la rue de Rivoli, le bruissement du vent, les éclats de voix qui parlent toutes les langues de Babel. Une fois ragaillardi, longer les façades du Théâtre Sarah Bernhardt et s’engager sur le Quai de la Mégisserie. La rivière en-deçà offre son plus beau vert-de-gris. Faire une œillade à la Conciergerie, en passant, juste parce qu’à son habitude elle arbore ses chapeaux pointus, puis aviser le Pont Neuf qui réclame aussi un peu d’attention.
Dans la Samaritaine toute nouvelle on respire un air réfrigéré, on observe une déco ripolinée, aux Malheurs des Dames. C’est une dernière étape pour se désacclimater, avant d’attaquer le gros morceau.
Mais il est trop mastoc, ce palais. Ce Louvre-là. Cette place forte qui commence son jeu d’intimidation par le déploiement de ses douves et l’étirement de ses façades. À cela s’ajoute l’étuve. L’asphalte irradie des volutes bleu pétrole, sauf à l’ombre des guichets, qui sont bien encombrés.
Ce matin de Juillet n’en est plus un. C’est une fournaise sous un azur trop confiant.  
Allez, hop, pyramide ou pas, on reviendra.

 

Reprenons le métro.