dimanche 22 octobre 2017

鸛の物語 二

 - Mmmh, je dirai , même, pour être plus précis…
 - Pardon ?
 - Shirasagi, un héron blanc. Très connu, très apprécié par ici.

Il repose le sceau sur son bureau. Un beau bureau, style années trente, bois lourd, tiroirs lourds, plateau gainé de maroquin impeccable. Tout, dans la pièce où nous sommes, semble avoir de la valeur. Il ne m’a pas été recommandé par hasard. Il est reconnu dans des cercles restreints. Antiquaire, francophone, dont l’adresse – une vieille maison de brique un peu en retrait du bâtiment emblématique de Daimaru sur l’avenue Midosuji – ne trahit rien de ce qui peut se tramer à l’intérieur. Sur rendez-vous uniquement.

Il repousse ses binocles sur son nez, qu’il a petit. Il est petit. Frêle. Coupe en brosse, d’un noir de jais. Très bien mis, façon mannequin pour enfant, années trente.

 - Vous en êtes sûr ?
 - Oh, je ne peux l’affirmer avec certitude, je ne suis pas expert en Ardeidae, j’en ai bien peur... Ce hanko semble avoir été gravé juste après la restauration de Meiji, je dirai, fin XIXe siècle. Très beau travail. Orfèvrerie du Hyogo, j’en suis convaincu, à voir la courbature du trait, et la qualité de l’ivoire. C’est à coup sûr un 雅号, un sceau d’artiste. Rares sont ceux où ne figurent aucun kanji… Juste cet oiseau stylisé. Étrange.

L’objet, sur le bureau, semble s’incruster dans le cuir.

 - Allez à Himeji. Au château. On saura qui vous êtes.

Je me perds un peu dans mes formules de politesse. Mon acolyte lève un avant-bras d’objection, que je  rabaisse doucement. Je récupère le sceau – le gagō-in, donc – et, étui, poche, nous prenons congé.

Dehors, il pleut toujours à verse. Étrangement, les rues sont toujours au sec, dans ce quartier commerçant, recouvertes qu’elles sont de canopées artificielles. Mais les gens dans le métro du retour ont tous un parapluie mouillé, qu’ils ont soigneusement emballés de cellophane.

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